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7 décembre 2010 2 07 /12 /décembre /2010 08:08

 

La Confrérie de Saint-Vincent

  

 La plus ancienne des associations de notre village Ville Saint Jacques est incontestablement, la confrérie de Saint-Vincent.

Ses origines remontent, sans doute, à la seconde moitié du Moyen-âge (14ème, 15ème siècle) ; à l’époque où sont nées beaucoup de confréries religieuses qui représentaient des sociétés de marchands, des corporations d’artisans et bien des formes de mouvement communal. “Les authentiques raisons de piété qui se trouvent à l’origine de ces initiatives n’excluent pas l’intention de donner un aspect respectable à des entreprises pouvant susciter l’inquiétude des gens en place” (encyclopédie Théo Ed.1989 p.347).

On célèbre donc Saint-Vincent, patron des vignerons, à Ville-Saint-Jacques depuis plusieurs siècles. Il devait donc y avoir une activité vitivinicole importante. Ceci peut s’expliquer par la présence de coteaux, certains relativement bien exposés, mais surtout à la proximité de la Seine qui offrait la possibilité d’un transport direct vers Bercy d’où partait l’approvisionnement des innombrables bistrots parisiens. Les cépages cultivés étaient, comme partout en Ile de France à cette époque, Bacot, Noah, Clinton, Othello etc… qui sont maintenant prohibés. Ces cépages donnaient, en grande quantité, un vin rouge de qualité médiocre. Toutes les maisons avaient une vigne de quelques arpents ou quelques ares et en 1900 le vignoble de Ville Saint Jacques était encore de 50 hectares. Plus tard l’apparition du chemin du fer et l’abandon des transports fluviaux ont favorisé l’approvisionnement en Bourgogne dotée de vins de meilleure qualité.

N’oublions pas de mentionner la culture du chasselas, raisin blanc de table, issu comme à Thomery de la treille du Roi de Fontainebleau.

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On ne possède, malheureusement, aucun document de cette lointaine époque, relatif à la Confrérie de Saint-Vincent. Toutefois un indice original semble attester de ses origines médiévales.

De mémoire d’homme, un cantique est chanté à l’occasion de la fête de Saint Vincent. Or en 1982, un prêtre, le Père Joseph Gélineau, jésuite et musicologue bien connu en cette deuxième moitié du 20ème siècle, nouvellement installé curé à Ville-Saint-Jacques, entend ce chant. Il constate tout d’abord que tout le monde ne chante pas exactement la même chose, ce qui n’est pas étonnant pour une œuvre qui, semble-t-il, n’avait jamais été écrite (ni les paroles, ni la musique) et qui s’était donc transmise par voix orale. Voici ce qu’écrivait à ce sujet le Père Gélineau dans « la Coquille », journal de la commune :

 

«  C’est le 23 Janvier 1982, après la messe de Saint Vincent célébrée en l’église de Ville Saint Jacques, que j’entends pour la première fois le cantique « O bon Saint Vincent ». On m’en avait parlé. Dois-je avouer que je n’étais pas curieux de l’entendre, persuadé qu’il s’agirait d’un cantique pieux sans intérêt …

Mais dès les premières mesures, je restais stupéfait. Puis je devins enthousiaste. Cette mélodie de procession, dans un mode s’apparentant au plain-chant, coupé de l’invocation Kyrie eleison, et jusqu’à la manière marquée et soutenue de chanter, tout me persuadait qu’il s’agissait d’une pièce très ancienne, d’un genre antérieur à ceux de l’Epoque Classique ou même de la Renaissance. Il rappelle des pièces de pèlerinage que l’on trouve en divers pays d’Europe aux 14ème et 15ème siècles, mais dont nous avons peu de témoins en langue française.

Ma curiosité de musicologue étant ainsi piquée, je fis faire quelques recherches dans les anciens recueils diocésains. Mais ce chant n’y figure pas. J’ai posé des questions dans d’autres régions vinicoles : Champagne, Bourgogne, Val de Loire. Personne ne connait le cantique de Saint-Vincent. Il a donc dû se transmettre par voie orale dans le village de Ville-Saint-Jacques.

Le texte a sans doute subi des altérations au cours des âges, ne serait-ce que par l’évolution de la langue. D’où des déformations possibles, comme à  la ligne 6 qui ne donne pas un sens satisfaisant : «  de la gelée et des glaçons, en l’honneur de Saint-Vincent » (On pourrait chanter : « délivrez-nous, Saint-Vincent). Mais tel qu’il est, c’est une pièce rare qui mérite de ne pas disparaître. Ce cantique a un goût de terroir. Il nous rappelle nos racines. Il peut encore nous faire prier.

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Par ailleurs, la Confrérie possède une bannière de grande dimension (1m x 1,50m) en velours de soie décorée de broderie en fils d’or. Elle n’est pas datée avec précision mais des spécialistes consultés en 2003 ont estimé que sa facture était de 1850 – 1870.

 

En 2003, la confrérie s’est dotée d’une nouvelle bannière dont la réalisation a été confiée à l’atelier de broderie du Carmel Marie Mère de Dieu, à Forges, en Seine et Marne. En voici la description des artistes :

« Elle a été réalisée selon le modèle de la bannière précédente dont l’association est restée en possession, sur de la faille drapeau grenat, avec : A l’avers, une couronne de blés et de vigne enlacée de rose eu guipure, appliquée au point de Boulogne et au frisé or, et, au centre la copie à l’identique du personnage de Saint-Vincent,

Au revers, la même couronne appliquée au point de Boulogne et au frisé or, avec au centre, la nom de la confrérie de Saint-Vincent de Ville-Saint-Jacques en lettres peintes à l’acrylique or, cernées au frisé or.


Le maximum d’éléments de décoration et de broderie datant de la même époque ont été privilégiés : franges bouillon or, dentelle or en coquille, galon, guipure, dentelle et drap or, de façon à coller au plus près de la réalisation initiale de la bannière d’origine ».

 

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Les anciens racontaient qu’au début du 20ème siècle, au 19ème et sans doute également encore auparavant “ quand un garçon naissait au village, on allait le déclarer à la mairie et à la Confrérie de Saint-Vincent ”. En fait de registre de la Confrérie, on ne dispose que de celui commencé en 1909.

On l’a dit, chaque garçon était inscrit dès sa naissance sur un registre de la Confrérie. En fonction de son année de naissance, chacun à son tour, était sollicité pour être le bâtonnier de l’année. C’était pour lui un honneur qu’il célébrait en réunissant sa famille et ses amis autour d’une table à sa convenance.

Jusqu’au milieu du 20ème siècle, les populations étaient stables et la célébration de la Saint-Vincent à Ville-Saint-Jacques était une fête villageoise importante.

Le matin du samedi suivant le 22 janvier (fête de la Saint-Vincent), les confrères se réunissaient, certains chez le bâtonnier et tous à la croix de Saint-Vincent (qui n’a été mise en place que vers 1850 lors du déplacement du cimetière). Tous allaient alors, en procession, à l’église pour la messe patronale à laquelle assistaient tous les habitants du village, hommes, femmes et enfants. Au cours de cette messe, on bénissait des brioches qui étaient distribuées dans toutes les familles, contre une participation financière qui représentait la cotisation pour l’année. A une époque où le pain quotidien était souvent dur, la nature de la brioche était hautement symbolique. C’était une gourmandise que l’on consommait religieusement. Après la messe, les confrères faisaient la tournée des cafés du village, et chacun continuait la fête à sa guise en attendant le soir pour aller au bal de nuit qui était organisé, alternativement, dans chacun des cafés.

Ce protocole a perduré jusqu’en 1972 sans interruption, sauf pendant les deux guerres mondiales de 1914-1918 et 1939-1945.

Après la seconde guerre, les choses ont évolué en même temps que le mode de vie qui a amené en particulier des déplacements et des dispersions de familles. La notion d’ « habitants du village » a évolué. Des activités festives et ludiques ont été proposées à tous et la vie de la confrérie a elle aussi évoluée.

En 1974, la Confrérie a pris le statut légal d’ « Association sans but lucratif » (loi de 1901) en prenant le nom de « Confrérie de Saint-Vincent de Ville-Saint-Jacques ».

Dés lors, les choses évoluent mais l’esprit et la tradition restent. Le Bâtonnier est maintenant coopté parmi les Saint-Jacques-Villois habitant le village depuis quelques années. C’est un homme qui manifeste son envie de participer à la vie du village, qui aime la vie associative, le vin et la convivialité. Le matin de la fête, il reçoit ses amis confrères à son domicile. Le rassemblement général à lieu à la croix de Saint-Vincent et tous se rendent en procession à l’église autour de l’autel dédié à notre Saint Patron. Le bâtonnier est alors solennellement intronisé ; il reçoit un taste vin gravé à son nom, à porter en sautoir et un diplôme en souvenir de sa charge pour un an. Vient ensuite la lecture d’un passage de la parole de Dieu, un commentaire du prêtre et enfin la bénédiction des brioches et du vin de l’année précédente. La journée se termine par un banquet et un bal de nuit.

 

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 Le vin de l’année précédente ! En effet constatant la cessation d’activité du dernier « vigneron » (amateur) de Ville-Saint-Jacques dans les années 1990, la Confrérie a acheté un terrain en friche de 5,5 ares environ et y a implanté en 1997 un petit vignoble de quelques 150 pieds de chardonnay et quelques pieds de cépages anciens, à titre de conservatoire. Dix ans après la plantation, ce vignoble produit chaque année, 100 à 150 litres d’un vin blanc sec, au goût franc, à l’arôme tilleul, qui se marie à merveille avec les poissons, fruit de mer, choucroute et fromage doux.

L’entretien de la vigne, les traitements, la vendange, la vinification et l’embouteillage, faits par nos confrères, sont autant d’occasions de réunions amicales.

 

                                                           Bernard Le Bourhis

                                                           Octobre 2007

 

 

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commentaires

C
Je vient de découvrir vôtre blog et j ai retrouver le nom de mon père qui la porté en 1970 et aussi de mon grand-père marcel derichemond et c est cette occasion que j ai connue ma femme et je me suis marié en 1971
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  • : La confrérie de Saint-Vincent C'est l'ancienne confrérie des vignerons. Dirigée par un « bâtonnier », elle tient à cœur de fêter chaque année son saint patron, saint Vincent, le 22 janvier. Un monument rappelle encore cette dévotion à saint Vincent : une croix de carrefour qui porte le nom de croix de Saint-Vincent.
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